Malala à l’O.N.U.
Voici l'intégralité de la remarquable prise de position de cette jeune fille de 16 ans à l'ONU en faveur de l'éducation pour tous, afin de lutter contre l'obscurantisme du terrorisme, si effrayé par les livres et le féminin
Voici l'intégralité de la remarquable prise de position de cette jeune fille de 16 ans à l'ONU en faveur de l'éducation pour tous, afin de lutter contre l'obscurantisme du terrorisme, si effrayé par les livres et le féminin
Les démocraties sont fragiles
Snowden inculpé pour espionnage ! Cela ne manque pas de sel pour celui qui a précisément dénoncé l'espionnage massif de la NSA de chaque nation et de potentiellement tous les habitants de la planète !
Espionnage au service de qui ? Et a-t-il essayé de vendre aux plus offrants ces informations ? Cet homme, au contraire, à mit fin à sa carrière, a accepté l’exil à vie puis pris le risque de la maltraitance et de l’emprisonnement simplement pour respecter sa conscience et révéler aux citoyens du monde l’ingérence généralisé de ses employeurs dans la vie privée des personnes. Il faut donc saluer son courage.
Où est la voix de la France, pourtant « patrie des Droits de l'Homme » ? Il ne resterait donc plus que l'Equateur pour défendre la liberté dans le monde ? Nous vivons par ailleurs un symbole historique : c'est la première fois qu'un dissident occidental qui défend les libertés trouve refuge dans les pays de l'Est, Chine puis Russie ! Il n’y a pas si longtemps, à l’époque de Soljenitsyne et de Sakharov, c'était l'inverse.
Je n’ai bien sûr aucune légitimité à écrire ces lignes, si ce n’est celle d’un citoyen inquiet de la tournure que prend en ce moment l’Histoire, et le sentiment encore confus que nous vivons une période cruciale pour les années à avenir.
« L’épisode Snowden » est une jolie illustration des enjeux actuels : un combat essentiel entre les forces de la liberté et les puissances de contrôles. Allons nous laisser les plus paranoïaques d’entres-nous organiser la vie des sociétés et la géopolitique ? Ceci n’est pas sans rappeler un autre épisode douloureux, celui du maccarthysme, entre 1950 et 1954, où l’ennemi n’était pas l’islamiste radical mais le communiste. À l’époque, Albert Einstein dénonça les manœuvres du sénateur Joseph McCarthy comme « un danger incomparablement plus grand pour notre société que ces quelques communistes qui peuvent être dans notre pays », en ajoutant que « ces investigations ont déjà largement miné le caractère démocratique de notre société ». Monsieur le sénateur aurait certainement adoré disposer des immenses pouvoirs de renseignement de la NSA ! Aujourd’hui, hélas, l’histoire se répète, mais avec une technologie moderne et à l’échelle planétaire.
Les démocraties sont fragiles. L’histoire l’a déjà montré en au moins deux circonstances : la prise de pouvoir d’Hitler légitimement élu en 1933 et, dans les années 1990, l’interruption par l’armée algérienne des élections qui étaient sur le point de donner le pouvoir au Front Islamique du Salut. Sans parler du « printemps arabe », cet inespéré espace de liberté où se sont précipités les Frères Musulmans pour imposer leur loi en Tunisie, en Libye et en Egypte.
Néanmoins, réagir aux poussées antidémocratiques par une paranoïa contrôlante fait exactement le jeu des forces que l’on cherche à combattre. Jung appela cela l’énantiodromie. Le chasseur, à force de poursuivre sa proie et d’y porter une attention constante, devient semblable à ce qu’il tente de détruire. Alors la différence devient bien mince entre un totalitarisme d’Etat et l’action violente d’un groupe totalitaire. Tous deux nient la légitimité de l’autre, et aucun n’est sous le contrôle des citoyens cars ils échappent aux règles les plus élémentaires de la démocratie.
Les démocraties, si fragiles, méritent mieux que Prism ou Echelon qui creusent le lit de ce qu’ils prétendent combattre. Qu’est devenu l’esprit des Lumières, pourtant si fondateur de nos valeurs occidentales ? Jefferson, qui admirait Francis Bacon, Newton et Locke, est-il en train de se retourner dans sa tombe en contemplant la politique de ses successeurs ? Ces hommes, d’une manière ou d’une autre, croyaient au pouvoir du questionnement, de la raison et de la liberté humaine pour comprendre la nature et organiser le vivre ensemble. Or, aujourd’hui, Les forces de contrôle de la vie privée, qu’elles soient technologiques avec les programmes anglais et américains, ou idéologiques avec la montée en puissances des conflits religieux, font admirablement bien leur travail. Est-ce cela que nous voulons ?
Heureusement, lorsqu’un homme comme Snowden se lève, au risque de sa vie et au nom de sa conscience, pour dénoncer l’injustice, il réveille tous ceux qui crurent un instant que la liberté de conscience et les Droits de l’Homme étaient des acquis définitifs de l’Histoire.
Par de-là le personnage, son aventure ne laisse personne indifférent. C’est qu’elle fait écho à une structure mythologique universelle : celle du héros prométhéen qui « trahit » les siens (les Titans puis les Dieux) pour apporter aux hommes un surcroît de liberté et de connaissance. Sa posture est extraordinairement ambivalente car elle entre en résonance avec un l’archétype symbolisé, dans la mythologie grecque, par Prométhée : du point du vue du vieux monde, c’est-à-dire de l’ancien système de pensée, le Titan est un traître ; du point de vue du nouveau monde, tous voient en lui un prophète.
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